L’événement
Pour ses 30 ans, Têtu reprend sa posture de combat
Têtu fête au mois de juin son 30ème anniversaire, avec la sortie d’un numéro spécial et augmenté, une grande soirée festive à l’occasion de la marche des fiertés parisiennes et une offre d’abonnement attractive pour retrouver un portefeuille d’abonnés digne de ce nom. Loin de l’état d’esprit, plus apaisé, qui prévalait en 2020 lors de la célébration des 25 ans, et un an après son changement d’actionnaire (de i/o média au groupe SOS associé au Refuge), Têtu reprend sa posture de journal de combat « et on l’assume », nous explique Thomas Vampouille, son directeur de la rédaction. Entretien.
Les Clés de la presse. Têtu fête ses 30 ans au mois de juin. Comment avez-vous préparé cet anniversaire ?
Thomas Vampouille. Cela n’a pas été si simple, car nous avions déjà fêté en grande pompe, et de façon festive, nos 25 ans en 2020, avec Mylène Farmer en couverture et un retour sur notre passé. Il était donc important de nous renouveler. Finalement, nous avons opté pour une couverture de combat car la situation a beaucoup évolué au cours des cinq dernières années. A l’époque, la communauté LGBT avait l’impression que ses revendications avaient été entendues, avec le mariage pour tous et les avancées en matière de PMA : le climat semblait apaisé. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas avec la montée en puissance des valeurs du trumpisme : l’homophobie a muté mais est loin d’avoir disparu, et les notions de diversité et d’inclusivité sont plutôt en recul. L’idée est donc d’utiliser la notoriété de la marque Têtu, dans la communauté et au-delà, pour repartir au combat.
Comment cela va-t-il se traduire ?
Th.V. Nous avons commencé le 17 mai, à l’occasion de la journée internationale de lutte contre l’homophobie et la transphobie, par la publication d’une tribune, signée par une quinzaine de grandes entreprises, françaises et internationales, appelant à maintenir et renforcer les politiques de diversité et inclusion alors que plusieurs entreprises, notamment aux Etats-Unis, reculent sur ces engagements fondamentaux. La démarche est d’autant plus essentielle qu’une étude, dont nous publions les résultats dans le magazine à paraître le 11 juin, montre un recul du sentiment d’inclusion des salariés en entreprise.
Le ressentez-vous également au sein de Têtu connect, le think-tank qui rassemble les acteurs et actrices du monde du travail pour promouvoir les talents LGBTQI+ et favoriser leur inclusion dans tous les environnements professionnels, et qui constitue le cœur de votre modèle économique ?
Th.V. Les entreprises affichent une certaine prudence dans ce domaine, voire un recul pour certaines sociétés américaines, mais cela ne remet pas en cause notre modèle économique. Nous devrions d’ailleurs être à l’équilibre financier en fin d’année. Paradoxalement, cela produit un effet de mobilisation, comme le montre la tribune diffusée pour la journée du 17 mai : j’ai même été surpris par certaines marques qui l’ont signé.
Pour en revenir à la célébration de vos 30 ans, quelles autres opérations avez-vous prévu en juin ?
Th.V. Fidèle à la tradition LGBT, qui associe combat et fêtes, nous allons aussi organiser une soirée, le 28 juin, soir de la marche des fiertés de Paris. Et nous lançons, du 1er juin au 31 août, une offre d’abonnement spéciale à tarif réduit (30 ans = 30 euros), afin de reconstituer un portefeuille d’abonnés digne de ce nom. Aujourd’hui, nous avons environ 5000 abonnés, mais Têtu mérite de dépasser les 10 000, comme dans le passé. En 2018, quand Têtu est reparu après trois ans d’arrêt, nous sommes repartis de zéro, en privilégiant la vente au numéro (qui se situe autour de 10 000 exemplaires, NDLR). Depuis la reprise, l’an dernier, par le groupe SOS et le Refuge, nous avons réduit, par souci d’économie et pour limiter les invendus, la distribution du magazine dans le réseau presse et relancé un modèle d’abonnement plus efficace. Pour seulement 30 euros par an, nos lecteurs auront droit aux quatre magazines, à un accès illimité au site tetu.com, avec l’intégralité des archives depuis 1995, et une newsletter hebdomadaire pour ne rien rater de l’actualité de notre communauté. Pour l’instant, l’offre est limitée à cet été : en fonction des résultats, soit elle sera renouvelée de façon ponctuelle, soit elle sera pérennisée.
Propos recueillis par Didier Falcand